La macroéconomie (dont le terme est introduit en 1933 par l’économiste norvégien Ragnar Frisch1) est l'approche théorique qui étudie l'économie à travers les relations existant entre les grands agrégats économiques, le revenu, l'investissement, la consommation, le taux de chômage, l'inflation, etc.
En tant que telle, elle constitue l'outil essentiel d'analyse des politiques économiques des États ou des organisations internationales.
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Selon Frédéric Poulon2, la macroéconomie est avant-tout une représentation hiérarchisée de l'économie, articulée entre les agents via des flux. En considérant d'emblée les relations entre les grands agrégats de l'économie, la macroéconomie cherche à expliciter ces relations et à prédire leur évolution face à une modification des conditions, qu'il s'agisse d'un choc (augmentation de prix du pétrole) ou d'une politique économique délibérée3. Contrairement à la microéconomie, qui favorise les raisonnements en équilibre partiel, la macroéconomie se place toujours dans une perspective d'équilibre général, ce qui l'amène à accorder plus d'attention au bouclage des modèles et à la dynamique de création et de maintien d'institutions essentielles, comme les marchés, la monnaie.
Partie de relations très simples, à l'image du modèle IS/LM reliant le marché des capitaux et celui de la monnaie ou de la courbe de Phillips reliant inflation et chômage, la macroéconomie a évolué vers la construction de modèles économiques complexes incluant à la fois des relations supposées entre variables et des relations comptables servant à définir les agrégats. Très utilisés pour analyser et prévoir les résultats des politiques économiques, ces vastes modèles (les plus frustes comportent une dizaine d'équations, les plus complexes dépassent les 1 500) sont à l'heure actuelle employés par la plupart des gouvernements, institutions statistiques (comme l'INSEE), organisations internationales (OCDE) et certains acteurs privés voulant disposer de leurs propres prévisions quant à la conjoncture.
Selon les penseurs grecs, l'économie désigne l'art de bien administrer sa maison. La microéconomie est donc historiquement la première forme qu'a pris l'économie. Il faut attendre le XVIIIè siècle, et surtout, avec le courant physiocrate pour avoir une première vision macroéconomique, c'est-à-dire, une représentation hiérarchisée de l'économie via des flux entre agents. Cette représentation se trouve dans l'ouvrage de François Quesnay, Tableau économique. Quesnay, médecin de la famille royale, avait pour ambition de représenter l'économie sur les bases de la circulation du sang. Toutefois, les considérations philosophiques des physiocrates et les évènements historiques ont rapidement rendu son Tableau économique obsolète.
Karl Marx, un siècle plus tard, proposera une représentation schématique de l'économie industrielle de son époque. Parallèlement, les fondateurs de l'école néoclassique ont utilisé la théorie marginaliste, pour agréger les comportements des agents économiques, c'est-à-dire les consommateurs et les producteurs. Cette microéconomie agrégée, approche souvent à la base de certaines théories macroéconomiques, est à la base de la théorie de l'Équilibre général de Léon Walras, et complété par Kenneth Arrow et Gérard Debreu. Cette vision de l'économie ne peut toutefois pas se confondre avec la macroéconomie, étant donné qu'elle ne se base que sur des comportements individuels, et n'analyse pas l'économie dans son ensemble.
La distinction systématique, pour autant qu'elle puisse vraiment se faire, entre microéconomie et macroéconomie n'émerge cependant vraiment qu'au cours des années Trente autour des travaux de John Maynard Keynes. Ce fut surtout le retentissement de sa Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie (1936)4 après-guerre qui conduisit à une séparation nette, d'abord dans le milieu académique, des deux domaines. La microéconomie se spécialisait alors sur les problèmes d'allocation des ressources par le moyen des prix relatifs, alors que la macroéconomie étudiait la production globale et le niveau des prix.
Écornée par l'échec des keynésiens à prévoir et à enrayer la stagflation consécutives aux chocs pétroliers, la macroéconomie de la fin du XXe siècle présente un double visage:
D'une part, on assiste à la construction de modèles de plus en plus complexes et élaborés, construction rendue possible par l'augmentation des capacités de calcul des ordinateurs ainsi que la généralisation des techniques d'optimisation dynamique. Cette voie est également soutenue par l'amélioration considérable des données dont disposaient les macroéconomistes pour tester leurs modèles (voir macroéconométrie). Il apparait cependant que la complexification des modèles n'apporte pas grand-chose en matière de pouvoir explicatif, et que les problèmes de cohérence deviennent difficilement surmontables avec un aussi grand nombre d'équations. L'ensemble de l'approche est également remise en cause par la critique de Lucas, l'économiste Robert Lucas Jr faisant remarquer que les relations macroéconomiques échouent à prendre en compte les réactions d'agents informés aux politiques économiques (voir Courbe de Phillips et Critique de Lucas)
D'autre part, des économistes formés à la microéconomie néoclassique cherchent à donner des fondements microéconomiques aux agrégats observés, en dérivant des grandeurs comme l'offre de travail ou l'investissement des offres des modèles microéconomiques. Ces tentatives, connues sous le nom de synthèse néoclassique, échouent cependant sur le problème de l'agrégation, avec des résultats démontrant que ce passage du niveau micro au niveau macro n'est possible qu'en imposant des hypothèses absurdement restrictives sur le comportement des agents (voir équilibre général).
L'approche néoclassique utilise alors au concept d'agent représentatif, supposant que les agrégats économiques se comportent comme s'ils répondent aux décisions d'un agent économique unique similaire à l'agent rationnel du niveau microéconomique. La capacité de ces modèles à prédire des résultats opposés en fonction des hypothèses faites sur l'agent représentatif et sur les paramètres de base jettent un doute profond sur la pertinence de cette approche.
Au début du XXIe siècle, des économistes cherchent à dépasser la distinction entre microéconomie et macroéconomie. La plupart des modèles macroéconomiques actuels font l'hypothèse qu'ils ne constituent qu'une simplification de la réalité, dont ils étudient un aspect particulier, comme l'effet de l'innovation sur la croissance, ou des structures monétaires sur l'investissement. De ce fait, ils mélangent relations macroéconomiques et extensions au niveau macroéconomique de relations microéconomiques pour autant que ces extensions soient compatibles avec les faits stylisés qu'on cherche à analyser.
Il existe cependant de nombreuses écoles et courants de pensée touchant à leur conception méthodologique et à leurs préconisations en matière de politiques économiques.
Plusieurs écoles utilisent en pratique des raisonnements macroéconomiques, avec des principes et des recommandations souvent très différents :